Jean Dufaux, de "La Complainte des Landes perdues" à "Meutes"
7 juillet 2016
-
On ne présente plus Jean Dufaux. Poids lourd de la BD franco-belge, la créativité du scénariste de 67 ans semble imperméable au temps qui passe. Retour sur deux de ses séries marquantes de la saison 2015-2016.
- Complainte des Landes perdues Cycle 3, tome 1 - Tête noire
- Jean Dufaux & Béatrice Tillier (c) Dargaud
Dans ce nouvel album de La Complainte des Landes perdues, qui marque un nouveau cycle dans la saga que vous avez créée il y a vingt-trois ans, vous allez un peu plus loin dans la légende de l’Eruin Dulea. Pourquoi ?
Jean Dufaux : Parce que cela correspond à la démarche créatrice de La Complainte des Landes perdues. Pour Grzegorz Rosinski et moi, au départ, La Complainte ne devait faire que deux albums centrés sur le personnage de Sioban. Mais c’est lors d’un voyage en Écosse que nous avions fait ensemble, puis en Irlande, que ce sont ouvertes pour moi les légendes de ses régions et l’idée d’en faire une série, La Complainte des Landes perdues. J’ai compris que plus que l’histoire d’un personnage, je voulais écrire sur l’histoire de ces régions. Surtout, sur la mythologie qui sous-tend l’histoire de l’Écosse. C’est ainsi que s’est développée La Complainte des Landes perdues. Au fur et à mesure que j’avançais dans l’histoire, je me suis demandé d’où vient Sioban ; d’où viennent les Sorcières ; d’où viennent les Moriganes ; d’où vient cette malédiction qui mine la famille des Sudène ; d’où vient cette idée que le Mal est au cœur de l’Amour et que l’Amour au cœur du Mal ? Aujourd’hui, je vais plus loin dans mon retour aux sources et je m’intéresse, dans ce troisième et dernier chapitre, à connaitre l’origine du Mal, l’origine des Landes perdues et l’origine de ces familles qui se combattent depuis des décennies.
Pourrait-on imaginer, lorsque vous aurez terminé ce troisième chapitre, que vous reviendriez sur le personnage de Sioban afin de nous conter ce qu’elle est devenue depuis la fin du premier cycle ? Savoir si elle a eu une descendance et comment celle-ci a évolué ?
D’abord à mon âge, faire un nouveau cycle ou lancer une nouvelle série, c’est quelque chose qui se calcule (rires). Et puis, j’ai d’autres projets... Je suis un scénariste plutôt lent.
Pourtant, vous êtes prolifique...
Oui, mais c’est parce que je travaille beaucoup et je n’ai pas dans mes tiroirs des tas de projets qui attendent. D’ailleurs, je n’en ai aucun en attente ! Et lorsque je prépare un projet, comme c’est le cas actuellement, je travaille sur un Spirou, cela prend du temps car je dois réfléchir à la façon d’attaquer ce projet, quels sont les thèmes que je vais développer, etc. tout cela prend du temps. C’est une réflexion avant l’écriture. Pour Sioban, si j’ai réussi mon coup, c’est parce que c’est un personnage qui vit en dehors de moi. C’est une jeune personne qui a grandi depuis que je l’ai quitté. Qui a certainement vécu d’autres aventures, je ne sais pas lesquelles, mais je n’y pense pas. Il est possible que l’on se rencontre plus tard, dans quelques années, mais cela dépendra surtout d’elle, pas de moi. Si elle a quelque chose à me dire, si elle a vécu quelque chose d’intéressant et qui peut enrichir la saga, alors elle reviendra. Mais ce n’est pas quelque chose que je peux affirmer pour le moment.
- Complainte des Landes perdues Cycle 3, tome 1 - Tête noire
- Jean Dufaux & Béatrice Tillier (c) Dargaud
Ce nouveau cycle de La Complainte, baptisé Les Sorcières, est dessiné par Béatrice Tillier. Qu’est-ce qui la distingue des autres dessinateurs avec qui vous avez collaboré ? Qu’est-ce qui fait son charme ?
Pour moi, ils sont tous uniques. C’est une femme. Il n’y a pas tellement de femmes dessinateurs de BD. Il y en a plus qu’avant, heureusement, mais nous ne sommes pas encore sur un même pied d’égalité.
Je pense que Béatrice Tillier apportera une sensibilité à La Complainte, elle apportera un regard féminin, un regard sur les familles et les liens familiaux et ça, ça peut enrichir la série. Il faut que chaque auteur enrichisse graphiquement La Complainte des Landes perdues. Il ne faut pas qu’un dessinateur soit un sous-produit d’un auteur qui l’a précédé. Delaby avait une force qui le rendait égal à Rosinski et Béatrice a une force qui la rendra égale aux deux précédents. Ce qui est bien, ce qui est une chance pour moi, c’est que la passation a pu se faire. Philippe Delaby et Béatrice Tillier se sont rencontrés, ils ont parlé. Ils ont pu définir exactement ce qui a été fait et ce qu’ils voulaient faire pour la suite de la série, l’un finissant et l’autre commençant.
Il y a aussi chez Béatrice une grande sensibilité aux contes et légendes et cela, c’était très important. Le monde féérique, elle adore ça. Elle adore les chants classiques. Elle chante d’ailleurs dans des chorales, ce qui a apporté une nouvelle sensibilité à la série. Si je travaille avec elle sur les Landes perdues, c’est parce que je sentais qu’elle allait enrichir cette série avec sa petite musique. Elle a ce regard et cette croyance dans les mythes et légendes.
7 juillet 2016
On ne présente plus Jean Dufaux. Poids lourd de la BD franco-belge, la créativité du scénariste de 67 ans semble imperméable au temps qui passe. Retour sur deux de ses séries marquantes de la saison 2015-2016.
- Complainte des Landes perdues Cycle 3, tome 1 - Tête noire
- Jean Dufaux & Béatrice Tillier (c) Dargaud
Dans ce nouvel album de La Complainte des Landes perdues, qui marque un nouveau cycle dans la saga que vous avez créée il y a vingt-trois ans, vous allez un peu plus loin dans la légende de l’Eruin Dulea. Pourquoi ?
Jean Dufaux : Parce que cela correspond à la démarche créatrice de La Complainte des Landes perdues. Pour Grzegorz Rosinski et moi, au départ, La Complainte ne devait faire que deux albums centrés sur le personnage de Sioban. Mais c’est lors d’un voyage en Écosse que nous avions fait ensemble, puis en Irlande, que ce sont ouvertes pour moi les légendes de ses régions et l’idée d’en faire une série, La Complainte des Landes perdues. J’ai compris que plus que l’histoire d’un personnage, je voulais écrire sur l’histoire de ces régions. Surtout, sur la mythologie qui sous-tend l’histoire de l’Écosse. C’est ainsi que s’est développée La Complainte des Landes perdues. Au fur et à mesure que j’avançais dans l’histoire, je me suis demandé d’où vient Sioban ; d’où viennent les Sorcières ; d’où viennent les Moriganes ; d’où vient cette malédiction qui mine la famille des Sudène ; d’où vient cette idée que le Mal est au cœur de l’Amour et que l’Amour au cœur du Mal ? Aujourd’hui, je vais plus loin dans mon retour aux sources et je m’intéresse, dans ce troisième et dernier chapitre, à connaitre l’origine du Mal, l’origine des Landes perdues et l’origine de ces familles qui se combattent depuis des décennies.
Pourrait-on imaginer, lorsque vous aurez terminé ce troisième chapitre, que vous reviendriez sur le personnage de Sioban afin de nous conter ce qu’elle est devenue depuis la fin du premier cycle ? Savoir si elle a eu une descendance et comment celle-ci a évolué ?
D’abord à mon âge, faire un nouveau cycle ou lancer une nouvelle série, c’est quelque chose qui se calcule (rires). Et puis, j’ai d’autres projets... Je suis un scénariste plutôt lent.
Pourtant, vous êtes prolifique...
Oui, mais c’est parce que je travaille beaucoup et je n’ai pas dans mes tiroirs des tas de projets qui attendent. D’ailleurs, je n’en ai aucun en attente ! Et lorsque je prépare un projet, comme c’est le cas actuellement, je travaille sur un Spirou, cela prend du temps car je dois réfléchir à la façon d’attaquer ce projet, quels sont les thèmes que je vais développer, etc. tout cela prend du temps. C’est une réflexion avant l’écriture. Pour Sioban, si j’ai réussi mon coup, c’est parce que c’est un personnage qui vit en dehors de moi. C’est une jeune personne qui a grandi depuis que je l’ai quitté. Qui a certainement vécu d’autres aventures, je ne sais pas lesquelles, mais je n’y pense pas. Il est possible que l’on se rencontre plus tard, dans quelques années, mais cela dépendra surtout d’elle, pas de moi. Si elle a quelque chose à me dire, si elle a vécu quelque chose d’intéressant et qui peut enrichir la saga, alors elle reviendra. Mais ce n’est pas quelque chose que je peux affirmer pour le moment.
- Complainte des Landes perdues Cycle 3, tome 1 - Tête noire
- Jean Dufaux & Béatrice Tillier (c) Dargaud
Ce nouveau cycle de La Complainte, baptisé Les Sorcières, est dessiné par Béatrice Tillier. Qu’est-ce qui la distingue des autres dessinateurs avec qui vous avez collaboré ? Qu’est-ce qui fait son charme ?
Pour moi, ils sont tous uniques. C’est une femme. Il n’y a pas tellement de femmes dessinateurs de BD. Il y en a plus qu’avant, heureusement, mais nous ne sommes pas encore sur un même pied d’égalité.
Je pense que Béatrice Tillier apportera une sensibilité à La Complainte, elle apportera un regard féminin, un regard sur les familles et les liens familiaux et ça, ça peut enrichir la série. Il faut que chaque auteur enrichisse graphiquement La Complainte des Landes perdues. Il ne faut pas qu’un dessinateur soit un sous-produit d’un auteur qui l’a précédé. Delaby avait une force qui le rendait égal à Rosinski et Béatrice a une force qui la rendra égale aux deux précédents. Ce qui est bien, ce qui est une chance pour moi, c’est que la passation a pu se faire. Philippe Delaby et Béatrice Tillier se sont rencontrés, ils ont parlé. Ils ont pu définir exactement ce qui a été fait et ce qu’ils voulaient faire pour la suite de la série, l’un finissant et l’autre commençant.
Il y a aussi chez Béatrice une grande sensibilité aux contes et légendes et cela, c’était très important. Le monde féérique, elle adore ça. Elle adore les chants classiques. Elle chante d’ailleurs dans des chorales, ce qui a apporté une nouvelle sensibilité à la série. Si je travaille avec elle sur les Landes perdues, c’est parce que je sentais qu’elle allait enrichir cette série avec sa petite musique. Elle a ce regard et cette croyance dans les mythes et légendes.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire