mardi 12 décembre 2023

C'est du livre et du bon - Québec

Regina Obscura : Le marteau des sorcières


Par Robert Laplante

Quoi de plus agréable l’été que de s’asseoir sur le sable d’une plage ou sur l’herbe chaude d’un parc, de profiter du soleil et de s’enfiler une petite saga qui nous guide vers les sombres sentiers d’un pays mystérieux et d’une époque rude. 

Mais quelle saga? Parce qu’à ce chapitre, il faut bien reconnaître qu’il y en a des tonnes. Là où le génial côtoie bien souvent le médiocre. J’en ai une séduisante pour vous  : La complainte des Landes perdues. Une épopée qui, tome après le tome, n’en finit plus de me fasciner. Et ça tombe bien, parce que le nouvel opus du règne des sorcières Regina Obscura vient tout juste d’arriver sur les tablettes de nos librairies. 

Alors, ça raconte quoi ce Regina Obscura? Hum, un peu difficile à résumer. Non pas, parce que c’est touffu et confus au contraire la narration est d’une limpidité et d’une efficacité exemplaires. Difficile à synthétiser, parce qu’il est impossible de bien la jauger si nous n’avonspas lu préalablement le 3e cycle, celui de Sioban, ainsi que le 2e : celui des Chevaliers du pardon. Deux ères qui, bien que situées chronologiquement après celui des Sorcières, sont des clés essentielles pour saisir toute la subtilité de ces Landes perdues baignées dans de mystérieuses brumes aussi anxiogènes que démoniaques. 


                                 


Au moment où vous les aurez lus, vous tomberez sous le charme de cette légende racontée avec brio par un Dufaux en grande forme et un Tillier en totale maîtrise de son trait redoutable et héroïque. Sachez seulement que l’on y trouve de puissants diables, des hommes et des femmes qui s’affrontent, s’allient et se trahissent au gré de leurs intérêts, de leurs instincts psychopathes et de leur soif insatiable de pouvoir. Cette dernière nous amène souvent à faire des rapprochements douteux et dangereux avec les plus maléfiques créatures. Vous savez celles qui sévissent dans le monde des ténèbres.


                                         


Ça faisait un bail que Tillier et Dufaux ne nous avaient pas proposé un nouveau tome des Sorcières. 4 ans plus exactement. 4 ans où on a pu quand même découvrir le 4e cycle, Les Sudenne, qui cette fois-ci suit celui de Sioban. 

Ouf, un peu mélangeant tout ça me direz-vous. Et vous avez parfaitement raison. Passer d’un round à l’autre, d’une époque à l’autre, sans ne jamais terminer le récit c’est un peu déstabilisant. Bref tout ça pour dire que pour m’y remettre il a fallu que je relise les deux premiers tomes des Sorcières. 

Mais une fois que j’ai renoué avec les enjeux, les drames, les trahisons, les révélations, les rebondissements et la trame des deux tomes précédents, j’ai pu me délecter, encore une fois, de ce cycle à la hauteur de trois autres. Même si, comme pour chaque tome de La complainte des Landes perdues, j’y ai ressenti un peu de frustration. L’insatisfaction de celui qui veut en savoir plus et qui devra encore attendre des mois avant de pouvoir goûter à nouveau à la subtilité et à l’intelligence d’un récit aussi réussi scénaristiquement que graphiquement. 

                                     


Mais l’attente est aussi un des plaisirs des grandes sagas. Surtout quand chaque nouveau cycle et chaque nouvel opus enrichit le le précédent et complexifie, tout en restant limpide et logique, le glorieux, mais dramatique passé des Landes perdues. 

Un passé plus grand que nature, qui doit beaucoup à Dufaux certes, mais aussi à Rosinski, Delaby, Teng et Tillier et à leur trait trempé dans l’angoisse, le désespoir, le fatalisme résilient et une certaine luminosité timide. Comme si l’espoir refusait de mourir devant les ombres de la nuit sans fin qui étouffent cet univers de papier parfumé aux flagrances de l’Irlande de jadis. 

Alors est-ce que Regina Obscura vaut la peine d’être lu? Oh que oui! Mais il faut quand même lire le reste de la saga avant. 

Et comme moi vous oublierez vos voisins bruyants, qui écoutent la radio trop fort, qui empestent l’huile de noix de coco et qui polluent l’air de la plage, de la forêt, de la campagne, de la ville et de la montagne avec leurs odeurs de grillades trop cuites. 

Dufaux, Tillier, La complainte des Landes perdues, les sorcières, tome 3 Regina Obscura,tome 3, Dargaud. 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire